BURLESQUE & POLITIQUE : LA REVUE ENGAGÉE – première partie Juliette
BURLESQUE & POLITIQUE : LA REVUE ENGAGÉE – première partie Juliette Dragon et Seb le Bison, les instigateurs du Paris Burlesque Festival, arrivent sur scène main dans la main pour chauffer un peu le public et lui rappeler l’art et la manière d’encourager les onze artistes qui se dénuderont, durant trois soirs, pour leur plus grand plaisir. Ça hurle, ça rugit, ça miaule, dans la petite salle du centre FGO-Barbara. C’est bon, les festivités peuvent commencer ! La jolie pin-up polonaise Betty Q ouvre la revue avec un effeuillage dans la pure tradition rétro. Vêtue d’un uniforme militaire et d’une jupe crayon, le calot fixé sur la tête, la petite soldate se réapproprie les gestes des pin-up américaines des années 50 dans une danse dynamique, adressant au publi quelques clins d’œil complices, le sourire radieux. C’est alors que la réalité de la guerre frappe, et la soldate disparaît sous les bombes pour réapparaître sous la forme d’un ange dans une fine lingerie rouge amour. Jouant avec de larges éventails de plumes blanches, ce cupidon burlesque sort un rouge à lèvre de sa petite culotte et marque sur son ventre ces quatre lettres : M A K E, avant de dévoiler un cache-sexe en forme de cœur. Faites l’amour, pas la guerre : un message de paix salutaire pour ouvrir une revue dédiée à l’engagement militant. Juliette demande aux « hommes de la situation » de la rejoindre sur scène. Un Poutine, fort, sûr de lui, arrive aux côtés d’un Sarkozy gesticulant, sous les rires du public surpris. Avec ceux-là pour gouverner des peuples, on aurait bien besoin d’un miracle, insinue Juliette. Son vœu est exaucé : sur un air d’Ave Maria, la Sainte Apparition. L’italienne Sylvie Bovary, dans sa grande miséricorde, octroie l’hostie à chacun des deux politiciens. Et le miracle se produit : le Président russe, soudain épanoui et en accord avec son homosexualité refoulée, entraine notre ancien Président dans une valse énamourée. Changement d’ambiance, le tonitruant « Personnal Jesus » revisité par Marilyn Manson succède au doux Ave Maria, donnant le ton à un effeuillage simple, provocateur, iconoclaste. Drapée de rouge et d’or, l’Italienne nous laisse apercevoir son corps entièrement tatoué, prend son temps, joue avec nos nerfs, pour finir en Christ sur la croix vêtue, comme Lui, d’un simple périzonium. C’est au tour de Ginger Spank, d’Amsterdam, de nous proposer sa solution pour échapper aux écoutes de la NSA : se mettre nue. Sur les paroles de Rammstein « We’re all living in America », la jeune femme rousse se libère de la grande puce électronique fixée à son dos, de son masque à gaz et de son uniforme militaire, coupant tout contact avec Big Brother. Elle se moque ici ouvertement de l’agence de renseignement qu’elle affilie avec humour aux systèmes les plus liberticides du monde. Face au tout sécuritaire, Ginger Spank prône la liberté, dans un effeuillage simple rendant hommage à Edward Snowden. Pendant que Lola Saigon, l’efficace stage kitten, s’active à nettoyer la scène pour le prochain show, Juliette fait un souhait auprès du public : la prochaine fois que l’un de nous croise un sans domicile fixe, elle voudrait que nous le regardions, lui sourions, le considérions. Elle laisse la place à la Britannique Glory Pearl, mendiant dans la rue, un gobelet à la main, un panneau « J’ai faim » à ses genoux. Mais miracle, voilà qu’on lui fait don d’une liasse de billets, et par-là même d’un pouvoir : le pouvoir d’achat ! Après qu’elle a pourvu aux besoins nécessaires, la nouvelle riche se lance dans une folle danse consumériste, accumulant des biens de plus en plus luxueux, chaussures de diamants et collier de perles. Autre luxe : la culture. Le ventre rempli, c’est au tour de l’esprit de se nourrir. Plongée dans la lecture de Karl Marx, Le Capital. Critique de l'économie politique, l’ancienne SDF prend conscience des limites du système capitaliste, injuste et aliénant, et surtout que l’accumulation de biens et d’argent ne fait pas le bonheur. C’est toujours avec un jeu comique remarquable que Glory Pearl s’effeuille, se débarrassant de tout le superflu, pour finir fièrement nue, le point levé, avec un simple cache-sexe strassé à l’effigie de Karl Marx ! Dernier moment fort de la première partie de la Grande revue : l’hommage au Dictateur de Charlie Chaplin par Deena Ray. Sur « I’ve got the power », la jeune hollandaise singe un Hitler mi grotesque, mi sexy, arme au poing, qui se la donne sérieusement ! Deena rejoue alors la célèbre scène du globe terrestre avec beaucoup d’humour, son dictateur tentant de baiser le monde. Impuissant, il abandonne et s’abandonne. La danseuse aguerrie se métamorphose, laissant tomber la moustache, délivrant sa longue chevelure, troquant l’uniforme pour une robe rouge. Elle virevolte et s’effeuille tendrement au son d’une musique qui s’est faite douce, mélancolique, ponctuée d’un message fort que Deena fait passer par ses gestes : « You, the people, have the power ». Allumant une bombe, elle s’écroule, quasi nue, dans une explosion de plumes de blanche colombe. Deena Ray nous a offert un effeuillage chargé d’émotion et lourd de sens, nous emmenant du rire aux larmes, sous les acclamations du public conquis ! Che Guerazade Photos : Hervé Photograff – François Eropic (Glory Pearl, nue) – Gief Kan (Sylvie Bovary, nue) -- source link
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